Caput Mortuum [Droit de réponse d’Olympe de Gouges]
Publié le 21 Avril 2021
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Homme, es-tu capable d’être juste ? C’est une femme qui t’en fait la question ;
A l’origine des combats pour l’égalité des droits, connais-tu ma déclaration ?
Oui, le mariage est hélas le tombeau de la confiance et de l’amour,
Veuve à l’âge de vingt ans, je n’exclue pas que l’on me fasse la cour,
Mais je préfère écrire et garder la liberté de m’exprimer intacte,
Éditer en mon nom la militance politique en plusieurs actes,
Au nom des opprimés, de la sagesse, de l’humanité et de la patrie,
Quel qu’en soit le prix, même si je dois payer ce tribut de ma vie.
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Embourgeoisée, j’ai reçu une belle éducation mais pourtant,
Malgré les salons réputés je lève le poing et je défends,
En pasionaria la juste cause qu’est l’abolition de l’esclavagisme,
Irisant pour mes soeurs de couleur un arc en ciel au symbolisme,
Irradiant ma psyché à tel point que les menaces de mort dont je fus l’objet,
Ne purent atteindre ma détermination et ma volonté de plein fouet ;
Mais dis-moi ? Qui t’a donné le souverain empire d’opprimer mon sexe ?
Sont-ce mon courage, mon talent, mon esprit innovant qui te vexent ?
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Libre, instruite, engagée, si certains me virent telle une courtisane,
D’autres au contraire surent me consulter pour mes secrètes arcanes,
Quand la révolution se fut vive pour lutter ardemment contre la dictature,
Dénoncer les massacres, les fourberies anti-démocratiques et les impostures ;
Regardez-moi, non les femmes ne sont pas de petites bêtes chétives,
Qui rechercheraient l’approbation d’un mâle, entre vos bras craintives,
Elles savent prendre les armes, combattre injustice et oppression,
Et n’ont pas pour être pleinement humaines à se cacher derrière vos noms.
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Reniée par mon propre fils je monte avec dignité sur l’échafaud,
Qu’importe si la misogynie ambiante m’assimile alors à une virago,
Oui, les femmes ont le droit et même le devoir de politiquer,
Pour défendre aujourd’hui et demain, la liberté, l’égalité et la sororité,
Et si rarement on les voit applaudir à la noble action d’une autre femme,
C’est qu’elles rivales, ils peuvent ainsi régner en patriarcat pour diviser nos âmes,
Osez donc déjouer les oracles, brisez la mauvaise destinée des Moires,
Allons enfants de la Matrie, vous vengerez ma mort, le jour de gloire …
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Qui aurait pu prédire qu’en 2017 nous lutterions et reviendrions en arrière,
Que nos droits laborieusement acquis seraient toujours entre les mains des Pères,
Qu’il nous faudrait défendre avec ardeur nos intérêts, nos fondamentales libertés,
Car les religieux de tous bords voudraient soumettre nos âmes et nos corps cadenasser,
Qui aurait cru qu’il faudrait se soulever à nouveau contre l’insupportable esclavagisme,
Les imposteurs faisant courber le dos du peuple le molestant avec leur sophisme,
Et que nous nous déchirerions lors des présidentielles partout dans le monde,
Marchant main dans la main contre la violence, la malignité et les peine vagabondes.
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